Les termites vivent en colonie de plusieurs millions d’individus répartis en différentes castes : les ouvriers, les soldats et les reproducteurs. Ces derniers sont les seuls dotés d’ailes qui leur permettront de s’envoler le temps d’un unique vol nuptial et qu’ils perdront ensuite.

C’est durant ce vol qu’un prince fécondera une princesse, qui deviendra reine, et qu’il fondera avec elle une colonie. Le couple royal coulera ensuite des jours paisibles, enfermé dans la termitière, le roi fécondant les millions d’œufs pondus par la reine.
Mais pour chaque couple royal termite, ce sont des centaines de princes qui sont laissés pour morts, sans ailes, seuls et loin de leurs colonies.
Ces insectes sociaux ne peuvent pas survivre seuls, ils ont besoin de leurs congénères pour se partager les tâches de construction et de surveillance du nid ainsi que pour se nettoyer mutuellement (ce qui est vital lorsqu’on habite dans du bois mort). C’est ainsi que les mâles célibataires, ne pouvant pondre des larves, se mettent tout naturellement à vivre ensemble et voient alors leurs chances de survie grimper de 0% à plus de 40%.

Ces véritables petits couples fonctionnent à merveille, mais vont-ils pour autant rester liés pour le restant de leur vie ?
Le but ultime de la vie d’un prince termite reste de féconder une reine. Et pour les célibataires tout espoir n’est pas encore perdu ! Il est encore possible de s’accoupler avec une reine déjà installée, car il faut savoir qu’une reine termite n’éprouve aucun intérêt quant à l’identité de son partenaire. C’est cet infime espoir qui pousse les mâles célibataires à s’entraider afin de rester en vie le plus longtemps possible.

Car en théorie, si des célibataires trouvent un couple royal, ils peuvent alors tuer le roi afin que l’un d’eux prenne sa place.
Dans ce cas, les anciens alliés oublieront vite leur vie commune et deviendront rivaux, car il ne peut en rester qu’un aux côtés de la reine. Mais le jeu en vaut la chandelle : faire équipe, même avec un futur concurrent, reste vital pour des termites qui ne peuvent survivre seuls.
Cette stratégie représente un réel avantage même si les chances de reproduction sont très minces. La vie commune de ces mâles célibataires est une véritable coopération pour la survie qui permet à chacun de voir briller le faible espoir d’une nouvelle opportunité d’accouplement. Tout en ignorant encore la féroce compétition qui en découlera.
■ Hugo Le Chevalier
Références bibliographiques
• Mizumoto, N., Yashiro, T., & Matsuura, K. (2016). Male same-sex pairing as an adaptive strategy for future reproduction in termites. Animal Behaviour, 119, 179-187. https://doi.org/10.1016/j.anbehav.2016.07.007
📷 Photo en-tête : Thomas Chouvenc